Un point de basculement pour l’absentéisme bientôt atteint en Belgique ? L’absentéisme de moyenne et longue durée semble stagner, mais il y a plus d’absences de courte durée
- Plafond possible pour les absents de longue durée : le pourcentage de maladie de moyenne et de longue durée est resté quasi au même niveau en 2018 qu’en 2017.
- C’est la première fois depuis la crise de 2008 que le nombre d’absents de longue durée n’évolue pas de manière significative.
- Le travailleur belge est plus souvent malade à raison d’une augmentation des absences de courte durée : le pourcentage de maladie de courte durée augmente de 5 %. Il y a 13 ans que ce pourcentage n’avait plus évolué de manière significative en l’espace d’un an.
En 2018, il se peut que l’absentéisme ait atteint un point de basculement en Belgique. Pour la première fois depuis dix ans, le nombre d’absents de longue durée (absents pendant plus d’un an) reste quasiment le même que l’année précédente. Le pronostic de Securex à propos d’une augmentation moins forte que les années précédentes s’est vérifié. Depuis mai 2018, l’augmentation mensuelle n’était plus significative, et au cours des trois derniers mois de 2018, elle était même inexistante. En revanche, en 2018, les travailleurs belges se sont plus souvent portés malades pour une courte période qu’en 2017. Ceci a entraîné une progression de 5 % du pourcentage de maladie de courte durée. Il y a 13 ans que ce pourcentage n’avait plus augmenté dans cette proportion en l’espace d’un an. L’augmentation du pourcentage de maladie total est donc entièrement imputable à l’augmentation du nombre d’absences de courte durée.
L’absentéisme total continue à augmenter en 2018
Sur une journée de travail moyenne en 2018, 7 travailleurs sur 100 étaient absents pour cause de maladie ou d’accident de la vie privée. Parmi ceux-ci, un peu plus de deux travailleurs ont été absents pendant moins d’un mois, deux entre un mois et un an et près de trois pendant plus d’un an. En 2018, la croissance quasi continue de l’absentéisme total s’est poursuivie dans le secteur privé belge. C’est déjà le cas depuis 2001. Le pourcentage de maladie total pour les entreprises jusqu’à 1000 travailleurs a évolué de 6,89 % en 2017 vers 7,07 % en 2018.
Pour la première fois en dix ans, l’évolution du nombre d’absents de longue durée n’est pas significative. Le pourcentage de maladie « de longue durée » (plus d’un an) et le pourcentage de maladie « de moyenne durée » (d’un mois à un an) sont restés pour ainsi dire au même niveau en 2018 qu’en 2017.
Le ralentissement du vieillissement, la conscience croissante de l’importance de la santé mentale et le succès possible de la loi sur la réintégration tempèrent l’absentéisme de moyenne et de longue durée
Après des années de croissance exponentielle et quelques années de croissance ralentie, l’absentéisme de longue durée n’a pas connu d’évolution significative en 2018. L’absentéisme de moyenne durée est resté au même niveau. Il est possible que les mécanismes qui déclenchaient l’augmentation de l’absentéisme de longue (et de moyenne) durée les années précédentes aient atteint leur plafond et que certaines initiatives enregistrent leurs premiers succès. En 2018, la proportion des plus de 55 ans était plus élevée qu’en 2017, mais nous observons malgré tout un ralentissement dans ce vieillissement. Ceci exerce une pression sur l’augmentation du pourcentage de maladie de longue durée.
Entre 2013 et 2017, Securex a relevé une forte croissance des principales causes du burn-out, du risque de burn-out et de la proportion des jours d’absence dus à des problèmes psychiques. La situation s’est améliorée en 2018.
« En 2018, les médecins-contrôleurs de Securex ont enregistré 6,3 % d’absents en moins pour des problèmes psychiques que l’année auparavant, dit Heidi Verlinden, HR Research Expert chez Securex. Les travailleurs de notre pays ont également subi sensiblement moins de pression au travail, moins de travail émotionnellement exigeant, moins de pression liée aux déplacements domicile-lieu de travail et de stress privé. C’est un signal très positif, même si nous ne supposons pas pour autant que cela annonce déjà la fin de l’épidémie de burn-out. »
L’évolution du nombre d’absences de longue durée semble liée à la loi sur la réintégration entrée en vigueur fin 2016. Securex constate une baisse de la croissance mensuelle durant l’année 2016 qui a précédé immédiatement l’entrée en vigueur de la loi, suivie par une croissance mensuelle stable durant la première année (2017) et une croissance mensuelle en baisse au cours de la deuxième année (2018).
« Cela pourrait indiquer que des employeurs ont encore réintégré un certain nombre de travailleurs de manière informelle ou en ont licencié d’autres pour raisons médicales en 2016. Dans ce cas, le travailleur disparaît des statistiques d’absentéisme, ce qui peut expliquer la baisse de la croissance. Les premiers trajets de réintégration ont débuté en 2017, mais leur résultat n’est souvent perceptible dans les chiffres qu’un an plus tard. En 2018, la réintégration a réellement commencé, avec de surcroît un élargissement du spectre à tous les absents de longue durée, » précise encore Heidi Verlinden.
André Kruse, directeur général du service externe de prévention et de protection chez Securex : « On ne sait pas clairement aujourd’hui si la loi sur la réintégration a atteint son objectif. Ce n’est pas parce que le médecin du travail estime qu’un travail adapté ou autre est possible que l’employeur peut le proposer. Bon nombre de trajets de réintégration se terminent dès lors par un licenciement pour raisons médicales. Mais le but ultime reste la réintégration sur le marché du travail. Un licenciement pour raisons médicales ne peut pas être un point final. Il faut alors entamer un accompagnement intensif afin de trouver un nouveau job chez un nouvel employeur. »
Le travailleur belge est plus souvent absent pour une courte durée en 2018
Le pourcentage de maladie de courte durée (moins d’un mois) a augmenté de 5 % en 2018. Il y a 13 ans que ce pourcentage n’a plus augmenté d’une manière significative en l’espace d’un an. En 2018, les travailleurs belges se sont également portés plus souvent malades qu’en 2017 (+5 %). Cette fréquence croissante est entièrement imputable à un accroissement du nombre d’absences de courte durée. Ces déclarations de maladie supplémentaires ont été le fait d’un plus grand groupe de travailleurs qu’en 2017, car le pourcentage d’absents a augmenté lui aussi (+3 %). On n’a pas seulement noté plus de travailleurs absents, il y a également eu plus de travailleurs fréquemment absents. Car le groupe des travailleurs qui se sont déclarés malades trois fois ou plus a lui aussi fortement augmenté (+7 %).
En 2018, les travailleurs belges ont été absents en moyenne 1,1 fois pour cause de maladie ou d’accident de la vie privée.
Le pourcentage de travailleurs absents est passé à 53 % en 2018. Plus de la moitié des travailleurs ont donc été absents au moins un jour pour cause de maladie ou d’accident de la vie privée.
L’épidémie de grippe, l’été caniculaire, le manque de motivation et la pression élevée exercée sur les supérieurs hiérarchiques poussent l’absentéisme à la hausse
Une épidémie de grippe plus prononcée n’a pas été la seule responsable de l’augmentation de l’absentéisme fréquent et de courte durée en 2018. Securex constate, outre une forte augmentation des absences fréquentes et de courte durée durant les mois de grippe qu’ont été février et surtout mars, également une forte augmentation durant les mois d’été extrêmement chauds de juin, de juillet et d’août. Nous avons parallèlement observé aussi une forte progression de la fréquence en novembre.
Une motivation de moins bonne qualité pourrait également expliquer le nombre croissant de travailleurs absents.
« Depuis 2013, nous voyons une baisse de la motivation autonome (-7 %) et une augmentation de la motivation contrôlée (+11 %). Les travailleurs travaillent donc de moins en moins parce qu’ils le ‘veulent’ ou qu’ils trouvent que cela a du sens et ont de plus en plus le sentiment de ‘devoir’ travailler. Des problèmes d’autonomie, de sentiment d’appartenance et de compétence au travail peuvent conduire à plus de déclarations de maladie injustifiées – mais également justifiées – et augmenter ainsi la fréquence de l’absentéisme, » explique Hermina Van Coillie, HR Research Expert chez Securex.
Parallèlement, l’attention autour de l’absentéisme fréquent et de courte durée diminue probablement en raison de la pression que subissent les supérieurs hiérarchiques. Les absences fréquentes et de courte durée demandent un suivi cohérent. Lorsque la pression au travail est élevée, on peut difficilement libérer du temps pour cela.
Elisabeth Van Steendam, consultante Absentéisme chez Securex : « Les supérieurs hiérarchiques reçoivent souvent trop peu de temps et de marge de manœuvre de leur management pour lutter contre les absences fréquentes. Tout comme les membres de leurs équipes eux-mêmes, ils sont sous pression et sont moins attentifs aux signaux de leurs collaborateurs. Ils n’ont pas le temps pour des entretiens préventifs et un suivi cohérent. »
Un certain nombre d’employeurs ont peut-être déplacé aussi leur intérêt autour de l’absentéisme fréquent et de courte durée vers l’absentéisme de longue durée, notamment en raison de l’adaptation de la législation relative aux risques psychosociaux au travail de septembre 2014 et de l’instauration de la loi sur la réintégration de décembre 2016. Ces nouvelles lois obligent les employeurs à prendre des mesures contre les absences de longue durée : des mesures de prévention contre le burn-out et la réintégration des travailleurs absents de longue durée.
Infographies
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A propos de l’étude
Les chiffres de cette étude s'appliquent à un travailleur moyen d'une entreprise moyenne comptant jusqu'à 1000 travailleurs, dans le secteur privé belge.
L'échantillon de base en 2018 comprend 27 405 employeurs et 238 090 travailleurs du secteur privé.
La comparaison avec les données de la population de l'ONSS montre que notre échantillon reflète le marché du travail belge en termes de statut, de sexe, d'âge des travailleurs et de taille des entreprises comptant jusqu'à 1.000 travailleurs. Elle est moins représentative par rapport aux régions. C'est pourquoi nous corrigeons les chiffres de l'absentéisme avec un facteur de pondération propre à chaque province.
Le nombre de sociétés comptant plus de 1000 travailleurs dans notre échantillon fluctue. Compte tenu du poids d'une si grande entreprise sur le taux d'absentéisme de l'ensemble de l'échantillon, nous n'incluons plus ces grandes entreprises dans les chiffres globaux. De cette façon, nous évitons les fluctuations dans les chiffres de l'évolution dues aux fluctuations de l'échantillon.
Pour recevoir le white paper sur l'absentéisme : https://emailing.securex.eu/l/64002/2019-02-18/fnrcsk
Pour plus d’informations
https://press.securex.be/labsenteisme-en-2018--4-absents-sur-10-malades-pendant-plus-dun-an